Comment répondre à une crise en un minimum de temps, avec des capacités importantes et une organisation de crise peu lourde et couteuse au quotidien ? Cette question, qui est transposable à tous les domaines des risques, intéresse particulièrement des gestionnaires de risques. Ce sont quelques unes questions que Clara de Bort, cheffe de la réserve sanitaire a abordé lors de sa conférence de présentation de l'Établissement de Préparation et Réponse aux Urgences Sanitaires (EPRUS) dans le cadre Journée d'études « Santé publique, prévention, veille et intervention sanitaire : de la connaissance à l'action » organisée par Marie Jauret-Roustide (Cermes3-InVS) et Daniel Eilstein (InVS).
Clara de Bort a d'abord retracé la genèse de l'EPRUS : en 2006, alors que le virus de Chikungunya sévit sur l'ile de la Réunion, les services de santé locaux sont dépassés. Il se pose alors la question de la constitution d'un corps de « réservistes » en santé.
L'EPRUS voit le jour en 2007, sous la tutelle du ministère de la Santé. L'objectif est ainsi de venir en aide à toutes structures médicales qui en émet le besoin, tant par des moyens matériels médicaux que des moyens humains.
L'établissement pharmaceutique et la réserve sanitaire sont les deux pôles qui composent l'EPRUS et lui permettent de répondre aux différents plans nationaux d'urgence sanitaire. L'établissement pharmaceutique gère, et distribue en cas d'urgence, le stock stratégique de médicaments ainsi que de dispositifs, de matériels et d'équipements médicaux. La réserve sanitaire est l'entité qui permet de mobiliser les moyens humains nécessaires. Toute cette organisation est mise en œuvre au quotidien par 7 Équivalents Temps pleins. L'EPRUS complète ainsi le dispositif de renforts extra départemental/international composé de la gendarmerie mobile, et des CRS dans le cas de l'ordre public, ainsi que de l'Unité d'Instruction et d'Intervention de la Sécurité Civile en matière de secours publics.
La réserve sanitaire est constituée par 2000 bénévoles, actif ou retraité (maximum 5 ans après la cessation de leur activité), appartenant tous au domaine de la santé (médecins, infirmiers, professions libérales, etc.). Clara de Bort a insisté sur l'importance de former les volontaires pour assurer la réponse la plus efficiente possible.
L'activation de l'EPRUS se fait par le ministère de la Santé sur le territoire national et en partenariat avec le ministère des Affaires Étrangères à l'international. D'un point de vue organisationnel, pour effectuer une demande de renfort en France, les hôpitaux contactent les agences régionales de santé qui vérifient la véracité de la demande et la transmettent au ministère de la Santé au besoin. À l'international, c'est le pays requérant qui contacte le ministère des Affaires Étrangères qui, après étude, demande au ministère de la Santé de mobiliser l'ÉPRUS. En 2013, une vingtaine d'interventions en France, mais aussi à l'international, ont été effectuées par l'EPRUS, mobilisant une centaine de volontaires. Des exercices réguliers permettent à l'ÉPRUS d'être réactif. En effet, seulement 30 minutes en France et 24 heures à l'international sont nécessaires à l'établissement pour s'activer.
Notons que la loi santé prévoit de fusionner trois agences sanitaires françaises (EPRUS, InVS, INPES), dotant la France d'un seul établissement regroupant à la fois la prévention, la promotion, l'alerte, la surveillance, et l'intervention en santé.
La conférence a donné lieu à de nombreux échanges et nous a conduit à tenter d'en savoir plus sur ce dispositif de gestion de crises sanitaires. Nous nous sommes notamment intéressés à la question de la disponibilité effective lors d'une crise de réservistes pouvant par ailleurs exercer des fonctions pour lesquelles leur employeur peut avoir du mal à les libérer : salariés d'hôpitaux ou d'entreprises aux effectifs tendus par exemple. Dans ce cas, nous nous sommes intéressé à l'activation de l'EPRUS après la série d'attentats en région parisienne.
Les attaques terroristes du vendredi 13 novembre 2015, un événement multi-sites, a générée une situation exceptionnelle de crise. Une sollicitation accrue des services d'urgences et de secours a conduit la cellule interministérielle de crise (C.I.C) à activer l'EPRUS. Ses réservistes ont permis d'aider les personnels soignants dans les hôpitaux parisiens, de gérer l'accueil des familles, et ont effectué les premiers soins aux victimes, notamment en collaboration avec le SAMU et la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris au niveau des différents Postes Médicaux Avancés. Par ailleurs, avec la mise en place des cellules d'urgence médico-psychologique (C.U.M.P), ils ont participé conjointement à la prise en charge post-traumatique des témoins, des familles ainsi que personnels soignants.
Dans la gestion de cet événement, les effectifs ont visiblement été problématique du fait que les réservistes présents en Ile de France ont été sollicités par leurs employeurs et donc non disponible pour l'EPRUS. Nous n'avons pas d'éléments précis pour analyser comment ce problème a été réglé, peut-être par l'appel à des réservistes hors de l'Ile de France ?
Cet exemple permet de mettre en évidence l'importance de disposer un dispositif national de manière à gérer l'intervention et s'appuyer sur l'ensemble des ressources disponibles dans les différentes régions françaises.
Par Joscelyn CHENY, Rémi DOULCIER, Stéphane FOUEJIO, Saïd KHEMLICHE, et Constance RITZ
Etudiants du MIR