La participation des armées à la sécurité intérieure est une pratique française ancienne. Instaurée dans le prolongement du dispositif Vigipirate suite aux attentats en France de 2015, l'Opération Sentinelle a montré la réactivité des forces armées par la mise en place de 10 000 soldats en trois jours sur l'ensemble du territoire national malgré un contexte de déflation des effectifs et de rationalisation des moyens.
A caractère provisoire et face à une menace imprévisible qui ne faiblit pas, l'Opération Sentinelle a été prorogée à multiples reprises et s'est heurtée à la difficulté de pouvoir arrêter le dispositif par peur des répercussions sécuritaires et sur l'opinion publique. Si la population s'est habituée à vivre aux côtés des militaires, la présence massive des armées sur le territoire est remise en cause tant sur sa pertinence et que son utilité.
L'intervention des armées dans la sécurité intérieure doit être ponctuelle et hors état de siège, elle se cantonne aux directives de l'autorité civile. La pérennisation de l'opération montre également une législation dépassée, en cours d'évolution. Mission prioritaire, l'Opération Sentinelle demande une réorganisation du monde de la défense au jour le jour en raison de son monopole sur une grande partie des moyens et des effectifs. La cadence de l'opération est à l'origine d'une usure des forces armées qui est évoquée de manière récurrente dans les médias et est également constatée dans les rapports internes au ministère. Plus visibles et au contact constant avec la population, les militaires de l'opération sont également plus vulnérables et constituent des cibles privilégiées.
Outre la performance, la santé mentale et physique des militaires est mise en jeu et doit être préservée. L'étude des facteurs de risques psychosociaux et du dispositif de santé sécurité au travail du Ministère des armées permet de déceler les principales préoccupations des militaires et ainsi de hiérarchiser les facteurs de risques influençant leur bien-être comme la difficulté à concilier la vie privée et la vie professionnelle, propre au métier militaire en général et accru par les besoins de la mission Sentinelle ou encore l'inadéquation des moyens juridiques et du cadre d'intervention, facteur propre à Sentinelle. Les risques professionnels existent tout autant dans le monde militaire que dans le monde civil, cependant on ne parle pas de santé et sécurité au travail dans le cadre opérationnel. Cela ne signifie pas pour autant que l'institution ne se préoccupe pas du « Moral » et de la santé-sécurité de ses militaires, le Ministère des Armées faisant preuve d'amélioration continue en la matière, bien que celle-ci soit progressive et hétérogène, ne perdant pas de vue les exigences de performance du métier.
Si l'avenir est incertain les armées et la France font preuve de résilience et s'adaptent de jour en jour à la menace. Servant pour la Nation et pour protéger la population, les militaires forment une population entraînée soucieuse de leur bien-être et d'y contribuer mais capable de compromis pour la réussite de la mission. Ainsi, si la mission leur semble peu valorisante et monotone, le taux de satisfaction des militaires n'est pas aussi catastrophique que ce qu'il en ressort dans les médias. L'opération Sentinelle n'est effectivement pas propice à l'attractivité du métier de militaire et peut être source de risques psychosociaux et d'épuisement, mais les valeurs de nos armées et la fierté d'être militaire reste largement prédominante. L'avenir de l'opération est à présent entre les mains du nouveau gouvernement…
Mots clés : Opération Sentinelle – Armées – Risques psychosociaux – Résilience – Sécurité intérieure – Santé et sécurité au travail – Facteur humain – Opérationnel – Protection de la Nation – Proximité avec la population – Rationalisation – Visibilité – Epuisement – Forces de sécurité intérieure